Description écologique paysagère de l’axe : Située en Afrique australe, la Namibie est entourée par l’Angola (au Nord), le Botswana (à l’Est) et l’Afrique du Sud (au Sud). Nation émergente, elle est l’une des premières à inscrire la protection de l'environnement dans sa constitution. En effet, on remarque que 44% de la surface totale du pays est constituée d’aires protégées ou d’aires gérées de manière durable et, depuis 1998, plus de 80 organismes communaux, couvrant 20% du pays et regroupant près de 10% de la population Namibienne, s'attèlent à la conservation de son patrimoine. En outre, la Namibie a adopté la Convention Ramsar relative aux zones humides d’importance internationale en décembre 1995 et le pays compte 5 sites s’inscrivant dans le cadre de cette convention depuis janvier 2020. La gestion de l'environnement est devenue primordiale pour ce territoire touché par de nombreuses problématiques telles que l’extraction illégale de diamants dans le sud du pays, la production d’uranium à l'intérieur-même de certains parcs nationaux comme celui du Namib-Naukluft ou celui de Dorob ou encore le braconnage intensif du rhinocéros noir et de l’otarie à fourrure à Cape Cross, sur le côte Ouest, autorisé par le gouvernement Namibien. L’axe Namibien s’étend du sud au Nord de la Namibie sur sa région côtière bordant l’Océan Atlantique, à travers l’un des plus anciens déserts de la planète, le désert Namib. Sur plus de 2000 kilomètres du nord de l’Afrique du Sud au sud de l’Angola, la région côtière de la Namibie forme un immense environnement hyperaride aux conditions climatiques extrêmes. Les précipitations annuelles moyennes sont inférieures à 25 mm et la faune s’est adaptée pour vivre dans de telles conditions. Au nord-ouest de la Namibie, l’axe de migration lie la côte des squelettes, la région aride côtière, au Parc d’Etosha vers l’Est, par le corridor de la région de Kunene (ou "Cunene"). C’est une région isolée et qui a conservé une biodiversité exceptionnelle (*). Il lie ensuite l’ensemble de la zone Kavango-Zambèze (la plus grande aire protégée terrestre au monde, qui mesure 520 000 kilomètres carrés et qui est à cheval sur le Botswana, la Zambie, le Zimbabwe, l’Angola et la Namibie) et le parc national de Khaudum. *Le nord-ouest de la Namibie abrite des paysages très sauvages, permettant ainsi au rhinocéros noir de prospérer.

Description du réseau d’aires protégées de l’axe : La Namibie est l’un des rares pays à avoir inscrit la protection de la nature dans le marbre de sa Constitution. Aussi, à l’image de la Tanzanie, elle s’est dotée d’un ministère mixte, conjuguant le développement touristique et le respect de l’environnement. Elle possède un réseau important de parcs nationaux, de réserves publiques, de monuments naturels ainsi que des "conservancies" privées, 38% de la surface terrestre du pays possède un statut de protection. Les "conservancies" communautaires sont des fermes gérées par les tribus autochtones qui en récoltent les fruits (écotourisme, safaris, etc.) et où la gestion de la faune sauvage y est conditionnées afin de permettre de conserver un bon équilibre entre développement de l’économie rurale et protection de l’environnement. Ces espaces, initialement constituées de terres communautaires, sont donc devenues des fermes où la gestion et d’utilisation des terres et la gestion de la faune sauvage sont réglementées. Des zones tampons ou « corridors » servant de lien entre les différents espaces protégés permettent aux animaux de circuler librement en fonction de leurs besoins en nourriture. Ces "conservancies" se distinguent des “conservancies commerciales”, lesquelles sont développées sur des terres en pleine propriété, comme celle de Khomas Horchland Conservancy, Ce grand axe de migration de la faune intègre plusieurs espaces naturels de grande importance pour la biodiversité comme les parcs nationaux qui constituent plus de 15% de la surface globale du territoire. Parmi eux, le Parc National d’Etosha au Nord-Ouest, il s’agit de la plus vaste réserve de Namibie, son rôle est essentiel puisque ce dernier accueille près de 114 espèces de mammifères différentes dont les rhinocéros noirs en voie d’extinction. De plus, le parc abrite l’Etosha Pan, un grand lac minéral, qui est le seul lieu de reproduction massive de flamants rose connu dans le pays. D'autres aires protégées, présentes sur toute sa côte Atlantique, font l’objet d’une importance capitale comme le Parc National Skeleton Coast, qui héberge quelques espèces endémiques de la Namibie (le dauphins de Heaviside ou encore le lézard Gerrhosaurus skoogi), le Parc National Namib Naukluft, plus grande réserve de Namibie, qui abrite le plus ancien désert du monde et certaines espèces insolites résistantes à ce climat (comme les geckos, les grand koudou, les hyènes, les chacals ou encore les oryx, les gnous et les zèbres de montagne) ou encore le Waterberg Plateau Park, véritable sanctuaire du rhinocéros noir considéré comme menacé par l’UICN. Dans la réserve naturelle de Daan Viljoen, surtout connue pour son attrait touristique et sa richesse naturelle (on y retrouve une grande quantité de faune sauvage), on retrouve le grand barrage d’Augeigas et son réservoir, qui constituent un enjeu controversé entre protection et développement économique. Le tourisme y est particulièrement présent, avec un grand nombre d’infrastructures et de facilités pour des activités telles que la chasse. La réserve privée Namib-Rand, à la frontière du Parc National Namib-Naukluft, a pour but de développer un “sanctuaire sans clôture” permettant à la vie sauvage de se déplacer sans interruption et dont l’accès au tourisme est restreint afin de diminuer son impact. Enfin, la Namibie accueille des “monuments naturels” dont le Ai-Ais Hot Springs (Ai-Ais signifiant “brûlant”) qui est la plus grande gorge naturelle d’Afrique contenant certaines des plus anciennes peintures rupestres du monde. Cette zone abrite le Rhebok gris (antilope indigène du sud de l’Afrique catégorisée comme rare) mais constitue aussi un grand défi pour la biodiversité puisque certaines portions de ce territoire sont sous EPL (permis de prospection exclusif d’exploitation minière). Afin de répondre à cet enjeu, le Ministère de l'environnement et du tourisme Namibien tentent de mettre en place des stratégie de réglementation afin de réguler ces zones et de réduire leurs impacts.

Description de la faune et des enjeux migratoires (types de migrations...) : La Namibie est la région sèche la plus riche au monde en termes de biodiversité. La pluralité des écosystèmes et paysages namibiens permet à de nombreuses espèces de s’épanouir sur l’ensemble du territoire. On retrouve notamment des populations de lions, de guépards, de rhinocéros noirs, de zèbres et d’autres animaux sauvages natifs de la région. Le pays abrite aussi quelques unes des espèces en danger comme deux espèces de vautours (Africain et à tête blanche), le manchot du cap, le lycaon ou encore les rhinocéros blancs et noirs, dont on estime la perte à plus de 97% en 60 ans (100 000 en 1960, 2 600 en 2022). Depuis plusieurs années, la faune se développe et on assiste à de multiples augmentations des populations de springboks, d’oryx algazelle ou d’impalas. Enfin, la Namibie revendique la plus grande population nomade de rhinocéros noirs d’Afrique et la plus grande population de guépards au monde. Les mouvements migratoires décrits par la communauté scientifique sur cet axe concernent principalement les migrations saisonnières de grands herbivores, à la recherche de nouveaux pâturages pendant la saison des pluies, comme c’est le cas pour les herbivores au sein du parc national d’Etosha. En effet, les éléphants qui vivent dans le désert de Namib, sur la côte ouest du pays (région de Kunene), parcourent des centaines de kilomètres pour s’y nourrir durant cette période. Des corrélations spatiales sont également décrites par les scientifiques pour les espèces prédatrices, qui suivent les migrations annuelles de leurs proies le long des cours d’eau namibiens (1). Enfin, si l’on sait que les zèbres ont fait l’objet d’un grand nombre d’études et que cette famille d’espèces migre vers l’Est, les grands mammifères eux se déplacent majoritairement du Nord vers le camp Namutoni. En été, on observe aussi une migration massive d’oiseaux en provenance d’Europe et à destination de la côte Ouest du pays (notamment la Skeleton coast ou “côte des squelettes”). Empruntant le corridor de Konene, ces oiseaux migrateurs naviguent sur plus de 200 kilomètres de long et 400 kilomètres de large, entre le littoral et la région centrale du Nord du pays, dans le Parc National d’Etosha.

Actions et projets de corridors : En 2010, le projet “Namibia Protected Landscape Conservation Areas Initiative” (NAM PLACE), a visé la création de zones de conservation paysagères protégées. Porté par le Ministère de l’Environnement et du Tourisme de la Namibie et de ses directions du tourisme et de la gestion des parcs et de la faune sauvage (DoT, DPWM), en partenariat avec le PNUD et financé par le Fonds pour l'Environnement Mondial (GEF), cette initiative d’une durée de quatre ans cherchait à agir de manière efficace sur la conservation des zones adjacentes aux aires protégées, en créant des corridors pour la préservation des espèces animales et les rendre compatibles avec le développement et le renforcement des moyens de subsistance des communautés locales présentes sur ces zones paysagères. Face à la nécessité d'intégrer la gestion des différentes unités foncières à l'échelle d’un paysage, le périmètre d’action de ce projet a été choisi pour être très large. Ainsi, il s’étendait sur 5 zones : des Complexes Mudumu North/South, Greater Waterberg, Greater Sossusvlei jusqu’au Greater Fish River Canyon et à la zone de la “ceinture verte” de Windhoek (“Windhoek Green Belt Area”). Il garantit que les aires protégées de l'État et les conservancies communautaires sont mieux liées au niveau du paysage, plutôt que de fonctionner comme une mosaïque segmentée. Dans le Nord-Est de la Namibie, le petit corridor de Sobbe relie le parc national de Madumu à la réserve forestière du Zambèze et s’étend jusqu’au nord à la zone de conservation transfrontalière du Kavangao-Zambèze. Bien qu’il ne représente qu’une partie de ces corridors, le corridor de Sobbe est indispensable pour permettre la conservation des éléphants, qui utilisent cette route de migration lors de la saison sèche d’avril à novembre. En provenance du désert de Namib (vior ci-dessus), leur mobilité au sein de ces vastes étendues est aussi précieuse pour faciliter leur adaptation aux conséquences des changements climatiques. Ainsi, en 2018, afin de mener à bien des actions de conservation efficace et de sensibiliser les acteurs locaux à l’importance de la préservation de cette faune sauvage, un contrat a été signé entre le conservancy (zone de conservation communautaire) de Sobbe et la société sud-africaine Distell, productrice de liqueur Amarula. Le journal Le Monde relate: “L’entreprise, qui produit la liqueur Amarula, dont le logo est un pachyderme, a payé 150 000 dollars namibiens (environ 10 000 euros) à l’organisation communautaire qui regroupe un millier de personnes contre l’engagement de celle-ci de ne pas construire d’habitations ni d’étendre ses champs ou ses pâturages à l’intérieur du corridor.”

Menaces et défis : La protection de l'environnement fait face à de nombreuses problématiques en Namibie : l’extraction illégale de diamants dans le sud de la Namibie, la production d’uranium au sein de plusieurs parcs nationaux comme c’est le cas du parc national du Namib-Naukluft ou Dorob. Le braconnage intensif est également une menace importante pour certaines espèces dans la région. Le rétablissement de la relation directe entre santé de la vie sauvage et prospérité des communautés locales à travers plusieurs programmes de conservation a considérablement diminué cette menace et de nombreuses espèces ont réapparu. De manière générale, les défis sont donc nombreux en termes de connectivité écologique. D’abord, ils tiennent la difficulté de trouver des bénéfices suffisant pour permettre aux populations locales de subvenir à leurs besoins, dans le cadre d’une politique de conservation qui était jusqu'ici basée sur un système de gestion d’aires protégées. La vision durable et globale qu’apporte l’approche paysagère et les projets de corridors adossés à une gestion locale et à une gouvernance communautaire permettra ainsi de pallier le manque à gagner des communautés, notamment en créant des opportunités de développement économique (via la mise en place de mesures incitatives pour une agriculture de subsistance durable et respectueuse de la nature, partiellement centrées sur l’utilisation de ressources énergétiques renouvelables, le développement d’instruments visant à sécuriser l’approvisionnement en eau, à maintenir la fonctionnalité écosystémique des ressources naturelles environnantes et des habitats et l’augmentation des revenus de base des communautés via le développement de filières locales pérennes et basées sur la nature et enfin la mise en place d’actions basées sur le système de paiement pour services écosystémiques). La majorité des menaces documentées qui pèsent sur le devenir de l’axe de migration Namibien découlent des projets de développement routier et d’infrastructures dans la région. Le corridor Trans-Cunene Le corridor Trans-Cunene relie le port de Walvis Bay au sud de l'Angola jusqu'à Lubango, sur une distance de 1600 km. Selon certaines sources datant de 2012, “la République de Namibie et la République d'Angola ont officiellement convenu en mai 1997 de créer le corridor Trans-Cunene afin d'ouvrir le nord de la Namibie et le sud de l'Angola à des opportunités de développement économique, dont le besoin se faisait cruellement sentir après 27 ans de guerre civile entre les principaux protagonistes, le Mouvement populaire pour la libération de l'Angola (MPLA), le Front national pour la libération de l'Angola (FNLA) et l'Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola (UNITA). Le corridor, qui comprend des liaisons routières, ferroviaires et aériennes, relie le port de Walvis Bay, en Namibie, à Lubango, près du petit port de Namibe, dans le sud-ouest de l'Angola. Par la route, il s'agit d'une distance de 1 551 km, avec un temps de transit (raisonnable) de quatre jours. Selon toute vraisemblance, le corridor transcunéen sera relié au corridor est-ouest de Benguela à Lobito et/ou Huambo, dans le centre-ouest de l'Angola.” Le corridor de Lobito Le 1er juillet 2024, certains médias ont repris l’annonce du gouvernement congolais de mettre en place un projet d’infrastructure majeur: le développement d’autoroutes d’une longueur de 1400 km, aussi nommé “corridor de Lobito”, faisant suite à de âpres négociations entre l’Occident et Pékin : “C'est le reflet d'une concurrence de plus en plus féroce entre l'Occident et Pékin sur cette région clé du monde”. En discussion depuis plusieurs années, c’est grâce à un investissement de l’entreprise publique China Road and Bridge Corporation (Crbc) que l’Angola s’apprête à signer avec le géant chinois de la construction edile afin de relier son territoire aux pays voisins, la République du Congo et la Namibie: de la province de Cunene, au sud, aux provinces de Zaïre et Cabinda, au nord-ouest. Le coût total de ce projet est estimé à 2,5 milliards de dollars.L’article indique, selon des sources de l’Agence Ecofin, que le “Crbc commencera les études peu après la signature d'un protocole d'accord, prévue lors du Forum de coopération Chine-Afrique" qui se tiendra à Pékin du 3 au 8 septembre. Selon le ministère angolais, "les études de faisabilité seront finalisées vers le milieu ou la fin de l'année 2025"”.

Références bibliographiques : (1) Martina Trinkel; Paul H. Fleischmann; Albert F. Steindorfer; Gerald Kastberger (2004). Spotted hyenas (Crocuta crocuta) follow migratory prey. Seasonal expansion of a clan territory in Etosha, Namibia. , 264(2), 125–133. doi:10.1017/s0952836904005588 (ou le lien : https://sci-hub.hkvisa.net/10.1017/s0952836904005588) : Articles qui décrit les mouvements de migrations des hyènes pendant les migrations saisonnières des herbivores, corrélation spatiale La faune de Namibie, RhinoafricaNamibie, WWF ; Namibie, Protected Planet (WDPA) ;



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